Dimanche 11 juillet 1999: Gasadalur - Vestmanna
Ce matin, il ne pleut plus. C'est déjà ça. Nous
émergeons à 9h30 et partons une heure plus tard pour un
itinéraire audacieux vers l'est de l'île. Les
pétrels, huîtriers et courlis nous tiennent compagnie un
moment. Le sentier balisé de cairns monte raide vers le col
Urðnagjógv (553m) et nous plongeons dans le
brouillard. Quelques lapins au bord du chemin et ça monte
toujours. Il y a maintenant un vent terrible qui nous renverse tandis
que nous atteignons un replat au niveau du col toujours dans la
purée. L'autre versant ressemble à un précipice
sur la carte. Nous ne tenons pas à vérifier. La sortie
du col est en direction d'une arête à environ cinq cent
mètres au sud. La boussole et l'altimètre ne sont pas
inutiles car la carte à grande échelle est
imprécise. La ligne de cairns oblique dans la bonne direction
et monte encore un peu à flanc mais nous la perdons au bout de
quelques centaines de mètres et aboutissons soudain à
une faille profonde et abrupte où nichent des
pétrels. C'est mauvais signe.
Le fond est invisible dans le brouillard mais le chemin est évidemment coupé. Pas question de faire de l'escalade. Mon compagnon commence à montrer des signes de nervosité. Sur la carte, le chemin continue encore, donc il passe forcément au dessus de la faille. Un coup d'oeil à l'altimètre, nous sommes un peu bas. Prenant directement dans la pente au dessus de nous, nous recherchons des indices... Après quelques minutes, un cairn. Ouf. Reprenons notre progression.
Nous nous perdons encore peu
après et devons revenir en arrière pour découvrir
l'arête qui débouche sur un couloir raide mais
franchissable. A force de descendre, voici à nouveau
l'herbe. Bientôt le brouillard se dissipe. C'est
Slaettanesgøtan.
Le panorama nous dévoile de nouvelles falaises et des cascades dans un paysage d'île inhabitée. Superbe. Un pluvier doré tourne et joue à cache-cache. Nous montons sur un promontoire proche pour observer la petite plaine de Vikár en dessous de nous qui est visiblement habitée. Quel isolement. La plage est jonchée de troncs d'arbres, résidus de tempête et fourniture gratuite de bois pour les habitants. La carte nous montre deux sentiers pour continuer. Nous choisissons d'aller visiter un petit lac tout près.
Il est temps de faire une pause. Les émotions de ce matin nous
ont creusé l'appétit. Devant Youx surpris et
amusé, je déballe mon matériel de pêche et
tente quelques lancers. En vain. Il n'y a pas assez d'eau à cet
endroit. Nous repartons pour explorer la belle rivière en
contrebas et les berges du lac Fjallavatn. Un labbe cherche des proies
dans les parages. Nous observons son manège. L'eau plonge dans
une gorge aux parois pleines de nids pour rejoindre la mer. Recherche
d'un gué sans succès. Nous longeons le lac avec de
multiples pauses ornitho. Paysage de tourbières tout
autour. Quelques cabanes de pêcheur. Des taches de soleil se
promènent dans le paysage. Le chemin disparaît au bout du
lac. Nous continuons au sud-est vers un col peu marqué. Un
jeune labbe manque de se faire marcher dessus. Il se plaque sur le
sol. Les parents ne doivent pas être loin.
Un peu plus loin, catastrophe. Youx découvre que sa belle carte
de transport achetée hier a subi les intempéries et se
trouve complètement déchiquetée, ce qui le plonge
dans un désespoir profond. Pour lui remonter le moral, un petit
café. Puis nous discutons. Le programme initial était de
traverser directement vers Oyrargjógv par un col mais comme
nous ne sommes qu'à quelques kilomètres de
l'aéroport, le plus simple est d'aller faire remplacer la carte
et de prendre le bus. Une traversée de marais puis un chemin
nous conduisent vers la civilisation. La carte changée, le bus
nous emmène directement au ferry qui traverse vers
Streymoy. Nous quittons l'île de Vágoy pour y revenir à
la fin du séjour. Nouveau café dans le ferry puis
courses alimentaires à la station Shell de Vestmanna. Nous
constatons après visite du village que les magasins sont
fermés à cette heure et que notre intuition fut bonne
d'être passé à la station service. En montant au
dessus des dernières maisons du village, nous trouvons un
endroit pas trop cabossé pour poser la tente. Une
tournée de riz mexicain lyophilisé et hop, au lit. Le
plafond nuageux est redescendu aux environs de cent mètres d'altitude.